Voilà, enfin les premiers rayons de soleil transperçaient les épais feuillages des arbres. J'étais sorti me dégourdir les pattes, j'adorais humer l'air un peu frais du matin. La verdure était encore humide, à cause de la rosée matinale. Ce moment là, il n'appartenait qu'à moi, et personne ne pouvait me le piquer. Pas même ma soeur, que je laissais à la tanière. Tous les jours, à la même heure, je partais vagabonder, au même endroit à chaque fois. Et ça aussi, comme le reste, on me le reprochait.. « Tu es réglé comme une horloge, c'est pas bon ! » me disait-on. Mais je n'écoutais pas, c'était mon quotidien et je n'aimais pas le changer. Cela me perturbait. Après tout, qu'est-ce qu'ils pouvaient en savoir, de ce qui est bon pour moi ? Ne comprendront-ils jamais que je suis … Différent ? Une fois arrivé à un sentier, un petit sentier, je m'amusais. Il y avait plein d'insectes, qui se faufilaient entre mes coussinets, ou alors qui volaient au dessus de moi. Et j'aimais bien les attraper. Mais comme toujours, il y avait des individus qui me critiquaient à ce sujet. Et alors ? Je ne leur accordaient que peu d'importance, à ces gens là. Moi je pense que chacun à le droit de se divertir, à sa manière … Et puis, il n'y a pas d'âge pour s'amuser. Les louveteaux n'en ont pas forcément l'exclusivité. Je venais d'attraper un papillon, mon dieu qu'il était beau ! Mais il se débattait, sous mes étroites pattes. Alors je le regardais, fixement, intensément. Je l'observais, c'était captivant ! Bien sûre, je l'ai très vite relâché, et il est parti. Pourquoi ne pas le tuer ? Et bien parce que je ne suis pas comme tous ces individus sanglants, qui se prétendent loup. Moi, j'aime et je respecte la vie sous toutes ses formes, et je refuse de m'accorder le droit réservé aux puissants, celui de la retirer. Quand je dis « puissants », je veux dire tous les esprits qui nous observent et nous guident tout au long de notre vie, sans que nous ne connaissions leur existence. Ceux qui tiennent notre destin entre leurs pattes, que les humains appelleraient « dieux ». D'accord, la mort ne me fait pas peur, en elle même. Je sais que, quand notre heure à sonné, c'est parce qu'il est tant pour nous de disparaître. Et je crois à une vie, après la mort. Mais c'est de nature, je refuse d'achever quelqu'un, alors que ce n'était pas son heure.
Et puis, sans faire attention, mon chemin avait dévié, et j'arrivais à la rivière. Sauf que je n'étais plus seul, devant moi était couché un autre loup, perdu lui aussi dans ses pensées, apparemment ... Alors lentement, je me suis approché de lui, sur mes gardes. Il n'avait pas l'air apaisé.